Le documentaire « Homos en politique, le dire ou pas ? » a été diffusé le 28 octobre sur France 5. Signé Jean‑Baptiste Marteau, ce reportage aborde un sujet encore sensible : l’homosexualité chez les élus et dans les appareils politiques. Le film se veut à la fois observateur et intime, mêlant témoignages publics et confidences personnelles du journaliste, figure bien connue des téléspectateurs de France Télévisions.
Un propos politique et symbolique
Le documentaire prend place dans un contexte politique récent. Jean‑Baptiste Marteau rappelle notamment le discours de politique générale prononcé à l’Assemblée nationale par Gabriel Attal. À peine nommé Premier ministre en 2024, le trentenaire avait conclu son allocution par ces mots : « Être Français en 2024, c’est pouvoir être Premier ministre en étant ouvertement homosexuel ». Cette phrase donne le ton du film : malgré des avancées législatives, la question du « dire ou pas » reste d’actualité.
Au fil des séquences, le réalisateur interroge les raisons pour lesquelles certains élus choisissent de rester discrets sur leur orientation sexuelle. Le film confronte images d’archives, interviews et scènes de vie quotidienne pour dresser un état des lieux nuancé. L’idée n’est pas d’imposer une ligne morale, mais d’éclairer les tensions entre vie publique et vie privée dans l’espace politique.
Le parti pris personnel du journaliste
Jean‑Baptiste Marteau n’occulte pas sa propre histoire. Il commence le documentaire en se présentant : « Je m’appelle Jean‑Baptiste Marteau. Je suis journaliste à France Télévisions. J’ai un compagnon, Jean dont je suis amoureux ». Ce choix d’énoncer publiquement sa situation intime inscrit le film dans une démarche autobiographique assumée.
Le journaliste confie aussi une forme de renoncement. Il explique qu’il aurait souhaité faire de la politique, mais que, « au début des années 1990, la norme c’est l’hétérosexualité ». Faute de modèles visibles à cette époque, il s’est éloigné de cette voie. Ces paroles interrogent la manière dont les représentations sociales influencent les trajectoires individuelles.
Par ailleurs, le documentaire montre Marteau en journaliste-justificatif : il questionne non seulement les autres mais aussi sa propre génération et sa famille. En se mettant en scène, il cherche à comprendre comment le privé et le public se répondent et parfois se heurtent au sein d’une société en mutation.
Confidences à la maison : mère et grand‑mère
Une séquence particulièrement touchante réunit la mère et la grand‑mère du journaliste. La scène se déroule autour de cartons de photos. Marteau interroge sa grand‑mère : « J’avais quel âge la première fois où tu t’es dit : ‘Il est peut‑être un peu différent’ ? ». Cette question, simple en apparence, ouvre un échange intime et sans effets.
La grand‑mère évoque le regard porté sur le comportement enfantin — déguisements, maquillage — et dit avoir rapidement compris. La mère, elle, rapporte la peur et la stigmatisation qui régnaient autrefois : « être homosexuel, c’était un handicap. Dans les années 1970, ils se cachaient ». Ces confidences rappellent que les proximités familiales peuvent à la fois protéger et contraindre.
La grand‑mère livre une phrase forte, rapportée dans le documentaire : « Peut‑être qu’ils avaient raison de ne pas le dire. Ce n’est pas une référence. Chacun vit la vie qu’il veut et ce qu’on fait ça ne regarde pas son voisin […] Gabriel Attal, je m’en fous qu’il soit homosexuel ». La formule, directe et sans détour, illustre un mélange de protection, d’inquiétude et d’acceptation propre aux générations plus âgées.
Ce que montre le film
En rassemblant témoignages politiques et séquences familiales, le documentaire articule deux temporalités : celle des institutions et celle de l’intime. Il rappelle que la loi n’efface pas automatiquement les préjugés, et que l’acceptation sociale progresse à des rythmes inégaux.
Le film ne prétend pas apporter une solution unique. Il ouvre plutôt une conversation sur la visibilité des personnes LGBT+ en politique et sur les arbitrages que ces dernières peuvent être amenées à faire. En montrant des visages connus et des récits privés, Jean‑Baptiste Marteau cherche à nuancer le débat et à rendre palpable ce qui, pour beaucoup, reste abstrait.
En clôture, le message est à la fois simple et lucide : des mots comme ceux prononcés par Gabriel Attal sont symboliques, mais ils ne suffisent pas à régler toutes les inégalités. Le documentaire pose la question de la représentation et de la liberté d’être soi dans l’espace public, et invite à mesurer le chemin qui reste à parcourir.


