Cyril Hanouna n’est visiblement pas le seul à irriter l’Arcom. Une nouvelle émission de France 2, Rendez‑vous chez le psy, suscite l’indignation d’une partie de la profession. Des psychologues dénoncent la « mise en scène » du programme et ont saisi l’Autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique (Arcom), selon des informations relayées par Puremédias et Le Parisien.
Le concept : des séances filmées « sans filtre »
Rendez‑vous chez le psy propose de filmer de véritables séances avec quatre psychologues expérimentés. Six patients y exposent des épisodes intimes — deuil, rejet familial, fausse couche — dans l’objectif affiché de « montrer sans filtre » ce qui se passe derrière la porte d’un cabinet.
Le décor, décrit comme chic, s’inspire de la série En thérapie, et la production affirme vouloir normaliser la consultation psychologique. L’émission se présente aussi comme un soutien à la « grande cause nationale 2025 » consacrée à la santé mentale, un cadre qui vise à donner une visibilité accrue aux problématiques psychiques.
Des professionnels choqués par la mise en scène
Plusieurs représentations professionnelles ont exprimé un malaise profond. Gladys Mondière, présidente de la Fédération française des psychologues et de psychologie (FFPP), estime que le programme donne « l’impression de regarder une émission de type ‘Top Chef’ ». Elle ajoute : « Sauf que la psychologie ce n’est pas de la cuisine, même si les professionnels qui ont accepté de participer sont des gens reconnus et sérieux », citée par Le Parisien.
Le Mouvement des psychologues cliniciens et psychologues psychothérapeutes (M3P) rejoint cette critique. Pour Cyrille Le Jamtel, codirigeant du M3P, le principal problème tient au côté « mise en scène » façon « téléréalité ». Il affirme : « Le programme est tourné dans un studio et il y a un montage. Ensuite, on a demandé aux participants de jouer par exemple à se promener dans la rue ou regarder par la fenêtre. »
Ces éléments de scénarisation heurtent des praticiens qui estiment que la relation thérapeutique ne doit pas être exposée à des procédés propres au divertissement. Plusieurs voix insistent sur la différence entre film documentaire classique et formats où montage et ordonnancement des séquences peuvent influer sur la perception des échanges.
Questions d’éthique et de secret professionnel
L’éthique professionnelle est au cœur des critiques. Gladys Mondière rappelle que « notre profession est soumise au secret, c’est fondamental ». Elle souligne que, dans ce programme, les personnes ne sont ni floutées ni anonymisées, contrairement à ce que l’on observe parfois dans des documentaires traitant de la santé mentale.
Florent Langlois, membre du collectif Printemps de la psychiatrie, confie qu’il est « sidéré » par le concept. « Consulter un psychologue, c’est accéder à un espace préservé et sécurisé pour s’exprimer. Ici, on fragilise ce cadre », déclare‑t‑il, selon les mêmes sources.
Le M3P a donc décidé de saisir l’Arcom afin d’obtenir des réponses sur les conditions de tournage, la protection des personnes filmées et le respect des règles déontologiques. L’instance devra vérifier si l’émission respecte les obligations en matière de protection des données, de consentement éclairé et de non‑stigmatisation.
À ce stade, l’Autorité n’a pas encore répondu publiquement à la saisine. Aucune décision ou sanction n’a été annoncée par l’Arcom au moment où ces éléments ont été relayés par la presse.
La production a par ailleurs diffusé des extraits et publications sur Instagram pour promouvoir l’émission. Ces publications ont contribué à élargir le débat, en provoquant réactions et interrogations au‑delà des cercles professionnels.
La polémique illustre la tension entre deux objectifs : donner de la visibilité à la santé mentale et protéger l’intégrité des pratiques cliniques. Les psychologues demandeurs d’une clarification attendent désormais la réponse de l’Arcom, qui devra trancher sur l’équilibre entre intérêt public et respect des règles déontologiques régissant la profession.


