La cour d’appel de Paris a donné raison à Fabien Lecœuvre dans le litige l’opposant à Grand Corps Malade. La décision, rendue le 17 octobre dernier, condamne la société de production du chanteur, Anouche Productions, ainsi que sa maison de disques, Universal, à retirer la voix du journaliste de la chanson Des gens beaux sous astreinte de 500 € par jour.
Conflit sur une voix empruntée
Le différend trouve son origine dans une intervention de Fabien Lecœuvre, chroniqueur et spécialiste des peoples, sur une web-radio. Interrogé sur la chanteuse Hoshi, il qualifiait cette dernière d’« effrayante » et lançait : « Enfin, vous mettez un poster de Hoshi dans votre chambre, vous ? » avant d’ajouter : « Elle a du talent, cette fille, vraiment, mais qu’elle donne ses chansons à des filles sublimes. »
Ces propos ont entraîné des vagues de cyberharcèlement à l’encontre d’Hoshi. Grand Corps Malade — qui avait publiquement pris la défense de la chanteuse — a intégré la voix et les formules de Lecœuvre dans son titre Des gens beaux pour dénoncer ces attaques. Selon Le Parisien, l’artiste reprend la voix et les propos du journaliste pendant 33 secondes, y compris sur les refrains. Lors d’une prestation le 10 juillet 2021 sur la grande scène des Francofolies, Grand Corps Malade aurait notamment chanté : « Monsieur parfois il faut s’taire, moi, je veux voir Hoshi sur un poster ». Le chanteur a également interprété ce passage lors d’autres concerts.
Procédures judiciaires et condamnation en appel
Après la diffusion de la chanson, Fabien Lecœuvre a assigné Grand Corps Malade en justice. En première instance, le chanteur était sorti victorieux. Mais après appel, la cour d’appel de Paris a renversé cette décision et donné gain de cause au journaliste. Le tribunal a ordonné le retrait de la voix de Lecœuvre de l’enregistrement et a fixé une astreinte de 500 € par jour en cas de non-respect.
Le jugement ne se limite pas à un simple retrait : il vise à protéger le droit à l’utilisation de la voix et le consentement des personnes entendues dans un enregistrement. La société de production et la maison de disques sont directement mises à contribution par la décision rendue le 17 octobre dernier.
Réactions des protagonistes
Interrogé après la décision, Fabien Lecœuvre a tenu à se défendre en rappelant son point de vue et l’histoire, estimant que le jugement protège les chanteurs contre l’utilisation de leur voix sans consentement. Il a déclaré : « C’est un jugement essentiel, car il défend les chanteurs en interdisant qu’on utilise leurs voix sans leur consentement. C’est la troisième fois dans l’histoire du disque que l’on vole une voix. La première, c’était Claude Piéplu en 1969, la seconde Léon Zitrone en 1982. Les deux avaient fait condamner les producteurs. Grand Corps Malade est un de mes auteurs préférés mais il a été victime de son avocat, qui l’a conseillé à tort. Il y a deux ans, j’ai reconnu une connerie et je m’en suis excusé auprès d’Hoshi. Je ne comprends pas qu’il s’entête. »
Du côté de Grand Corps Malade, l’équipe du chanteur a annoncé son intention de se pourvoir en cassation, indiquant qu’elle contestera la décision en appel devant la Cour de cassation.
Hoshi, elle, a réagi publiquement à l’annonce du jugement en repartageant l’article du Parisien sur son compte X et en exprimant sa colère. Elle a écrit : « Il ne s’arrête jamais lui c’est dingue. C’est quand qu’il se ‘retire’ de TPMP ? 😴 » en joignant le lien https://t.co/hzy2cZT0bT.
L’affaire illustre la tension entre liberté artistique et droits individuels sur l’utilisation de la voix d’un tiers. Alors que le dossier se dirige désormais vers la Cour de cassation, la décision d’appel rappelle que l’emploi d’extraits de voix en musique peut engager la responsabilité des producteurs et des maisons de disques lorsqu’il n’existe pas de consentement clair.


