Deux mères sous les projecteurs : Fayza Lamari et Céline Bonnet témoignent
Le colloque « Demain le Sport », organisé mardi 7 octobre 2025 à la Maison de la Radio à Paris, a offert un rare moment d’intimité publique. Lors de la table ronde intitulée « Mères de champions », Fayza Lamari, mère du footballeur Kylian Mbappé, et Céline Bonnet, mère du nageur Léon Marchand, sont revenues sur la double réalité de la célébrité : émerveillement et contraintes.
Les deux femmes ont décrit le basculement d’une vie ordinaire vers une exposition médiatique et matérielle soudaine. Le quotidien Le Parisien, qui a relayé leurs propos, qualifie leur intervention de mise en lumière de cette « réalité à deux faces d’une existence sous les feux des projecteurs ».
Un appel avant Paris 2024 qui a tout changé
Céline Bonnet a raconté comment elle a pris contact avec Fayza Lamari avant les Jeux olympiques de Paris 2024. « Notre premier contact date d’avant les JO de Paris 2024 », a-t-elle dit. Elle explique avoir appelé Fayza, qu’elle admirait, pour demander comment vivre la célébrité d’un enfant champion. « Nous avons discuté une heure et demie », se souvient-elle.
Fayza Lamari relate cette conversation comme un moment d’avertissement mêlé d’encouragement. Elle affirme avoir « mis en garde » sa consœur tout en évoquant « les choses positives qui allaient arriver » : « Nous ne sommes pas préparées à devenir des personnalités publiques », a-t-elle averti. Quelques mois plus tard, Léon Marchand devenait quadruple champion olympique et s’imposait comme l’un des plus grands nageurs français de l’histoire.
Le regard d’une mère sur la jeunesse d’un prodige
Fayza Lamari est également revenue sur l’enfance de Kylian Mbappé. Selon elle, le futur champion présentait des différences dès l’âge de 6 ans. « Quand Kylian avait 6 ans, il était un peu différent, rêveur. Il a fait un tournoi et j’ai vu qu’il n’était pas comme les autres », a-t-elle expliqué.
Pour élargir ses horizons, la mère du joueur raconte lui avoir imposé des activités qu’il n’appréciait pas à l’époque : « Je lui ai rajouté de la musique et du théâtre car il détestait ça et que je voulais justement qu’il voie autre chose. » Elle précise que, avec son père, la discipline a été ferme jusqu’à son départ à 14 ans pour le centre de formation de Monaco : « La culture de l’effort est indispensable. » Ces éléments décrivent une éducation volontairement structurée pour accompagner un talent précoce.
La célébrité comme parenthèse irréversible
Pour Fayza Lamari, la véritable rupture personnelle est intervenue après le sacre en Coupe du monde 2018. « Lors de la Coupe du monde 2018, j’étais toute seule chez moi. Quand je l’ai vu descendre les Champs-Élysées, j’ai su qu’il m’échappait », a-t-elle confié. Elle illustre ensuite, avec humour, l’écart entre leur vie d’avant et celle d’après : « Je l’appelais Justin Bieber car je suis passée directement de Bondy au Royal Monceau (hôtel de luxe parisien). J’avais l’impression que nous étions les Tuche. » Cette comparaison, mêlant dérision et distance, souligne le choc culturel et matériel subi par la famille.
Céline Bonnet a confirmé la difficulté à gérer la médiatisation. « J’ai très mal vécu la surmédiatisation », a-t-elle admis. Fayza a renchéri : « Moi aussi ». Elle a décrit la période parisienne de son fils comme une loupe grossissante sur les défauts : « Kylian à Paris, c’était une loupe grossissante sur les défauts, il n’y avait plus d’humain. J’ai eu des pics très bas. Aujourd’hui, nous avons très peu de moments pour nous. » Ces mots traduisent une fatigue émotionnelle liée à l’absence d’intimité.
Entre fierté et privation de normalité
Le témoignage des deux mères illustre un paradoxe fréquent dans le monde des champions : une réussite célébrée publiquement, mais qui s’accompagne d’une perte des repères familiaux et d’une privation de moments ordinaires. Les deux femmes, tout en reconnaissant les cadeaux matériels et professionnels que la gloire apporte, ont insisté sur le prix humain de cette visibilité.
Leurs interventions ont reçu l’attention d’un public sensible aux enjeux de l’accompagnement des jeunes talents. En évoquant la préparation, la discipline, la vigilance et la douleur de la surmédiatisation, Fayza Lamari et Céline Bonnet ont offert un témoignage rare sur ce que vivent les familles lorsque l’enfant devient un champion connu de tous.
