Ce 8 décembre 2025, Francis Huster fête ses 78 ans. Figure majeure du théâtre et du cinéma français, l’acteur a traversé les décennies en restant omniprésent : de la Comédie-Française aux plateaux, en passant par l’enseignement au Cours Florent, des succès populaires comme Le Dîner de cons à des sagas télévisées comme Zodiaque, jusqu’à sa récente participation à l’émission Les Traîtres sur M6. Sa longévité artistique masque cependant un traumatisme intime qu’il a peu à peu choisi de raconter.
Une carrière protéiforme et un visage familier
Acteur, metteur en scène et pédagogue, Francis Huster est l’un des visages les plus familiers du spectacle français. Formé et passé par la Comédie-Française, il a occupé des rôles marquants au cinéma et sur les planches. Sa carrière a aussi pris la forme d’une transmission : pendant de nombreuses années, il a enseigné au Cours Florent, façonnant des générations de comédiens.
Sa présence dans des productions populaires et exigeantes l’a rendu visible à différents publics. Des comédies au grand public aux projets plus intimistes, son parcours illustre une trajectoire plurielle. Plus récemment, sa participation à l’émission Les Traîtres a montré qu’il sait encore surprendre et rester au coeur de l’actualité médiatique.
Le drame intime qu’il a choisi de dire
Malgré la notoriété et les succès, Francis Huster porte un souvenir d’enfance profondément traumatisant. Il a raconté à plusieurs reprises, notamment dans Un dimanche à la campagne et dans ses ouvrages, l’agression sexuelle qu’il a subie quand il avait dix ou onze ans, chez ses grands-parents à La Varenne-Saint-Hilaire.
Selon ses récits, une nuit il entend une voix puis ressent une présence dans son lit, avant que l’inimaginable ne survienne : il affirme avoir été violé sous la menace d’un couteau posé contre sa gorge. L’enfant reste paralysé par la peur. L’agresseur s’enfuit lorsque la lumière d’une voiture — celle de sa grand-mère — traverse les volets. En proie au choc et en sang, le garçon tente ensuite d’expliquer ce qu’il a subi.
Au commissariat, ses grands-parents l’emmènent pour porter plainte. On lui montre des photographies d’hommes, dont des visages d’Algériens et de Noirs selon son récit, mais il ne reconnaît personne. Un détail tangible semble toutefois confirmer son récit : le chapeau oublié par l’homme, resté dans la chambre. Malgré ces éléments, l’agression demeure sans auteur identifié et l’enfant se heurte au silence autour de ce qu’il a vécu.
Francis Huster a expliqué qu’il a fini par raconter cet épisode non pour raviver la douleur, mais pour reprendre la parole et rendre justice à l’enfant qu’il était. Son intention, dit-il, était d’envoyer un message d’espoir : on peut survivre à l’indicible et continuer à se construire.
Le regard qui l’a sauvé
Parmi les images qu’il conserve de cette nuit, une scène a, selon lui, changé le cours de son histoire personnelle. Dans la voiture qui le ramène du commissariat, il croise le regard du compagnon de sa grand-mère, assis au volant. Ce regard, silencieux mais puissant, lui a dit qu’on le croyait et qu’il n’était pas détruit.
Francis Huster a souvent raconté l’impact de cet instant. « Ce regard m’a donné la vie », confie-t-il. Il explique que, dès lors, il a compris qu’il n’était pas coupable et qu’il ne devait pas porter la honte. Ce simple échange a constitué pour lui un socle : la sensation d’être reconnu comme être humain et la force de poursuivre sa route.
Ce moment, selon l’acteur, a contribué à forger la colonne vertébrale de l’homme qu’il est devenu — l’artiste, le professeur, le comédien qui a continué d’embrasser la scène et la transmission. En choisissant de délivrer ce récit, il a cherché à déjouer le silence et à transformer la blessure en une parole capable d’aider d’autres victimes.
À 78 ans, Francis Huster reste une figure complexe : à la fois célébrée pour son œuvre et marquée par un passé intime qu’il a décidé de dire. Son témoignage tranche avec l’évidence médiatique du succès et rappelle que derrière les lumières, la parole peut aussi servir de réparation.
