30 novembre 2025 — Ce dimanche, l’émission Un dimanche à la campagne réunit un trio inattendu : Pierre Lapointe, auteur-compositeur québécois à la carrière foisonnante ; Bernard Werber, romancier aux millions d’exemplaires vendus ; et Sidonie Bonnec, journaliste et autrice. Pour une partie du public français, la présence de Pierre Lapointe peut surprendre. Pourtant, l’artiste est installé dans le paysage culturel hexagonal depuis près d’un quart de siècle et sa notoriété a connu une accélération manifeste en 2025, année qui couronne vingt ans d’efforts continus depuis 2005.
Une carrière franco‑québécoise patiemment construite
Depuis 2005, Pierre Lapointe cultive un lien régulier avec la France. Il raconte vivre entre Montréal et Paris, « habitant Paris quatre mois par an », tout en gardant Montréal comme « ancrage vital ». Cette double présence a permis la construction d’un réseau d’alliés et d’amis, et une progression régulière de sa visibilité.
Selon ses déclarations à La Presse à Paris, l’année 2025 représente un tournant : « J’ai souvent eu des moments forts depuis 2005. Mais là, il se passe quelque chose qui ne s’était jamais passé avant ». La sortie en janvier de l’album Dix chansons démodées pour ceux qui ont le cœur abîmé a servi de détonateur, ouvrant de nouveaux plateaux et une médiatisation plus large.
La série de concerts en France confirme cette dynamique : un Olympia complet en mai, une Maison de la Radio affichant complet quelques mois plus tôt, et des dates ajoutées dans des salles mythiques comme les Bouffes du Nord. L’artiste note aussi un changement dans la vie quotidienne : « Désormais, on me reconnaît dans la rue », dit‑il en souriant.
La rencontre décisive avec Frédéric Lopez
L’invitation à Un dimanche à la campagne n’est pas un hasard éditorial. Elle découle d’une rencontre déterminante entre l’artiste et l’équipe de l’émission. D’après Pierre Lapointe, « Le directeur de programmation et l’animateur Frédéric Lopez sont venus voir mon show à l’Olympia. Ils ont dit : ‘Mais comment ça se fait qu’on ne le connaît pas plus en France ? Envoye, go, à l’émission !’ ».
Frédéric Lopez, connu pour des émissions comme Rendez‑vous en terre inconnue, a été touché par la singularité du chanteur. L’animateur a particulièrement remarqué la vulnérabilité et la manière de mêler humour, gravité et poésie. Lapointe confesse lui‑même son goût pour l’émotion : « Je suis toujours fier de faire pleurer les gens », a‑t‑il déclaré sur C à Vous en février 2025, conscient de l’effet miroir de sa musique sur le public.
Cette sympathie réciproque explique en partie pourquoi la télévision française lui ouvre désormais des plateaux de plus grande envergure. L’image qui se dégage est celle d’un artiste à vif, capable d’émouvoir un public varié tout en restant en marge des formats standardisés.
Un combat pour une chanson « démodée » assumée
À Radio France, Pierre Lapointe a défendu son écriture et son esthétique, parlant de ses « chansons démodées » avec fierté. Il dit s’accrocher « à des codes d’une autre époque — dans la prononciation, la façon d’écrire la poésie, de jouer les émotions dans un grand romantisme où il n’y a aucune demi‑mesure, tout en étant très contemporain ».
Il nuance le terme « démodé » : « On peut se demander ce que ça veut dire, en 2025, d’être démodé, alors que toutes les informations se mélangent sur le web. On a des vieux trucs, des nouveaux trucs… il n’y a rien de démodé aujourd’hui. La chanson française des années soixante n’est pas vue comme ringarde, il n’y a simplement pas beaucoup d’espace pour la diffuser. »
Au‑delà du discours, Pierre Lapointe s’implique dans la transmission. Il est notamment professeur à la Star Académie au Québec, ce qui témoigne d’un travail pédagogique et d’une volonté de rediffuser certains codes stylistiques auprès de nouvelles générations. L’article signale cette activité sans préciser de calendrier pour une implication comparable en France.
Entre reconnaissance croissante en France et fidélité à ses racines québécoises, Pierre Lapointe apparaît comme un artiste qui a su conjuguer exigence artistique et présence populaire. Son parcours illustre la lente construction d’une carrière internationale, ponctuée de rencontres et de moments publics décisifs, sans effacer les ambivalences d’une esthétique qualifiée de « démodée » mais revendiquée.
