Ce 18 novembre 2025 marque le 35e anniversaire d’une victoire qui a inscrit Florence Arthaud dans la légende de la voile. En 1990, la navigatrice devenait la première femme à remporter la Route du Rhum et gagnait pour toujours le surnom de « petite fiancée de l’Atlantique ». Cette victoire historique a façonné l’image d’une femme libre, courageuse et viscéralement attachée à la mer — mais la trajectoire d’Arthaud a été aussi jalonnée de drames et de frôlements de la mort.
Une victoire qui a façonné une légende
À la fin de l’année 1990, Florence Arthaud signe un triomphe retentissant : elle bat le record de l’Atlantique en solitaire, puis remporte la Route du Rhum à bord de Pierre Ier en 14 jours, 10 heures et 10 minutes. Ce succès, largement salué, place la navigatrice au premier rang d’un milieu longtemps dominé par les hommes. Elle incarne alors la ténacité et l’audace, qualités qui lui valent une admiration dépassant le cercle de la voile.
Pourtant, la victoire porte aussi une part de douleur cachée : durant la course, elle subit une hémorragie ayant entraîné une fausse couche, épisode qu’elle minimisera longtemps par pudeur et silence. Les années suivantes restent marquées par des exploits sportifs — la Transpacifique en 1997 et de nombreuses courses en duo — tandis que son image publique oscille entre héroïne de la mer et femme marquée par des pertes personnelles.
Des drames qui jalonnent une vie
La disparition de Florence Arthaud le 9 mars 2015 a choqué la France. L’hélicoptère qui la transportait, lors du tournage de l’émission de télé‑réalité Dropped en Argentine, s’écrase peu après le décollage. Aux côtés de la navigatrice, meurent également la nageuse Camille Muffat et le boxeur Alexis Vastine. Les hommages pleuvent et rappellent le parcours d’une femme pionnière, prête à repousser les limites.
Selon ses dernières volontés, Florence Arthaud est incinérée et ses cendres sont déposées sur l’île Sainte‑Marguerite, au large de Cannes, lieu où elle avait souvent navigué. Une cérémonie en mer lui rend un ultime hommage, fidèle à son attachement à l’océan.
Mais le crash n’est pas le seul épisode dramatique de sa vie. Bien avant d’accéder à la gloire, elle avait déjà frôlé la mort. En 1974, à 17 ans, alors qu’elle se destinait à des études de médecine, elle est victime d’un grave accident de voiture : sept tonneaux, un coma profond, des hématomes au cerveau et un pronostic alarmant évoquant une paralysie partielle. Elle passe six mois à l’hôpital de Garches, puis entame une longue convalescence de deux ans, soutenue notamment par le père jésuite Michel Jaouen.
Contre toute attente, elle se rétablit complètement. À 18 ans, elle traverse l’Atlantique avec Jean‑Claude Parisis, navigateur et écrivain, son premier amour. Ce voyage marque la naissance d’une vocation et symbolise une renaissance qui orientera le reste de sa vie.
Les années 1970 et 1980 voient Arthaud enchaîner les courses au large. Elle participe à la première Route du Rhum en 1978 et termine onzième. En 1986, lors d’une édition endeuillée, elle se déroute pour tenter de secourir Loïc Caradec, navigateur finalement disparu en mer : cette vision la hantera longtemps.
Trompe la mort à plusieurs reprises
Florence Arthaud survivra encore à d’autres épreuves. En 2001, son frère Jean‑Marie, avec qui elle avait appris à naviguer, se suicide sur le bateau familial. « Aucune douleur n’égalera celle de la perte de mon frère », écrira‑t‑elle plus tard dans Cette nuit, la mer est noire, témoignage de la douleur profonde qui la marqua.
En 2011, nouvelle frayeur : tombée à la mer en pleine nuit au large du Cap Corse, elle doit sa survie à une lampe frontale et à un téléphone portable étanche qui lui permettent d’alerter sa mère. Hélitreuillée en hypothermie après plus de trois heures dans l’eau, elle échappe une fois encore au pire. Ces épisodes successifs donnent le portrait d’une femme qui a constamment défié l’élément, la mort et ses propres limites.
La vie de Florence Arthaud, intense et risquée, se conclut tragiquement dans l’accident de 2015. Sa trajectoire, faite d’exploits et de souffrances, laisse le souvenir d’une navigatrice hors norme, dont la passion pour la mer a été à la fois la force et le risque permanent.


