Ce 7 novembre 2025, France 5 propose un nouveau numéro du magazine musical Fauteuils d’orchestre, animé par Anne Sinclair depuis le Théâtre du Châtelet. La journaliste reçoit ce soir l’un des ténors les plus en vue, Benjamin Bernheim, entouré d’Ermonela Jaho, Lisette Oropesa, Florian Sempey et de la violoniste Élise Bertrand, sacrée « Révélation soliste instrumental » aux Victoires de la musique 2024.
Un plateau musical de prestige
La programmation met en lumière des voix et des talents lyriques reconnus, ainsi qu’une jeune virtuose récompensée récemment. Fauteuils d’orchestre, émission culturelle du service public, confie chaque semaine à Anne Sinclair la présentation d’invités issus du monde de la musique classique et de l’opéra. Ce soir, le contraste entre la scène contemporaine et le parcours personnel de la présentatrice ajoute une dimension particulière au rendez-vous.
Des débuts marqués par le sexisme télévisuel
Avant de devenir la figure respectée que l’on connaît, Anne Sinclair a dû s’imposer dans un univers médiatique largement dominé par des hommes. Dès 1975, alors âgée de 27 ans, elle réalise pour Antenne 2 un reportage consacré à la fin de « l’année de la femme », proclamée par l’ONU. L’idée, suggérée par Bernard Pivot, consistait à envoyer une jeune femme interroger des hommes influents du paysage audiovisuel sur la place des femmes à la télévision.
Le résultat, rapporté et largement commenté par la suite, révèle des propos que l’on considère aujourd’hui comme ouvertement misogynes. Marcel Jullian, alors président d’Antenne 2, affirme : « Je ne veux pas être méchant, mais une femme, c’est quand même plus agréable à regarder qu’à écouter ». Jacques Martin déclare : « Je pense que notre métier est un métier d’homme. On prend tellement de risques pour faire nos sujets que j’aurais peur qu’il arrive un accident à une femme ». Quant à Pierre Bellemare, il renchérit : « Il y a quelques animatrices, mais ça ne me semble pas être un métier féminin. […] La carrière masculine est plus longue. Et puis, je ne sais pas trop à quoi ça sert, l’année de la femme ». Ces phrases, restituées telles quelles, témoignent d’un état d’esprit ambiant à l’époque.
Un souvenir évoqué en 2022
Près d’un demi-siècle plus tard, Anne Sinclair est revenue sur ce moment télévisuel lors d’une intervention dans l’émission C à Vous diffusée en novembre 2022 sur France 5. Elle a raconté que Bernard Pivot lui avait proposé ces interviews pour un numéro spécial d’Apostrophes intitulé Encore un jour et l’année de la femme, ouf, c’est fini. Elle se souvenait aussi d’autres figures présentes à l’époque, comme Hergé et un académicien, Sanguinetti, qui, selon elle, aurait dit à propos de Marguerite Yourcenar : « De toute façon, elle est trop moche ! ».
Sur le plateau de 1975, la ministre Françoise Giroud, chargée de la Condition féminine, observait la séquence. Anne Sinclair rapporte encore la remarque de la ministre : « C’est très bien, cette petite, pas mal les questions qu’elle pose ». Ce souvenir, dit avec fierté, montre que la jeune journaliste avait su interpeller des personnalités puissantes malgré un contexte hostile.
Une carrière construite malgré les obstacles
Ce baptême du feu n’a pas freiné la trajectoire d’Anne Sinclair. Après des débuts à Europe 1, elle rejoint TF1 au début des années 1980 et prend la tête de 7 sur 7, programme politique et sociétal devenu référence. De 1984 à 1997, elle occupe la case du dimanche soir et y mène des entretiens avec des personnalités internationales telles que François Mitterrand, Bill Clinton, Mikhaïl Gorbatchev ou Madonna.
Sa rigueur et son sens de l’écoute font d’elle l’une des rares femmes à s’imposer dans l’interview politique en prime time. En 1997, Anne Sinclair choisit de se mettre en retrait, un éloignement lié à son mariage avec Dominique Strauss-Kahn et à une volonté de s’éloigner d’une exposition médiatique fortement politisée.
Après plusieurs années hors des projecteurs, elle revient en 2011 à la direction du Huffington Post version française, contribuant à faire de ce site un média d’influence. Plus récemment, et après les événements publics autour de l’affaire du Sofitel ainsi que la séparation qui a suivi, elle oriente son activité vers la culture. Fauteuils d’orchestre reflète ce virage : l’émission se veut raffinée et centrée sur la musique et les artistes.
Ce 7 novembre 2025, la rencontre autour de Benjamin Bernheim et des invités du soir s’inscrit dans cette continuité, mêlant exigence artistique et maîtrise d’un format que la journaliste a façonné au fil des décennies.


