Pierre Lescure a finalement renoncé à rejoindre Sud Radio, invoquant la polémique déclenchée dès l’annonce de son arrivée. Le journaliste et ancien président du Festival de Cannes, connu aussi comme cofondateur de Canal+, avait été présenté comme le nouveau visage d’un débat hebdomadaire. Après des réactions vives dans la presse et sur les réseaux, il a expliqué, dans un communiqué publié le 4 septembre 2025, pourquoi il faisait marche arrière.
Une arrivée annoncée puis contestée
Sud Radio avait officialisé la venue de Pierre Lescure auprès de l’AFP : il devait intervenir chaque samedi dans un « face‑à‑face générationnel » avec Maud Koffler, une jeune journaliste de moins de 30 ans. Patrick Roger, directeur général de la station, avait décrit le format comme un échange entre « deux générations et deux points de vue ». L’information a suscité des réactions immédiates, notamment des commentaires critiques de la part de Libération, relayés dans les médias.
La controverse a pris de l’ampleur avant même que la première émission n’ait lieu. Lescure, chroniqueur d’Anne‑Élisabeth Lemoine dans C à Vous, s’est vu confronté à des accusations et des interprétations de son engagement que lui‑même juge « outrancières ». Plutôt que de poursuivre le projet dans ce climat, il a choisi de se retirer.
Le communiqué : des mots clairs et une mise au point
Dans son communiqué daté du 4 septembre 2025, Pierre Lescure déplore que l’annonce de sa participation ait « suscité des réactions, pour la plupart outrancières. Avant même de nous entendre Maud Koffler, Maxime Lledo et moi ». Il affirme ne pas vouloir « céder à la polémique » et refuse que son engagement soit résumé à des procès d’intention.
S’adressant aux critiques, il écrit : « Je pourrais dire, j’ai 80 ans et je vous emmerde. Mais je comprends qu’on ne change pas de profil, brusquement à mon âge. Je suis cinéma, musique et culture. Même si je vote depuis 60 ans et toujours à gauche. Dans l’extrême division que nous vivons, les procès d’intention ne feront qu’aggraver les fractures. C’est dommage et surtout dangereux. » Ces mots témoignent d’une lassitude face à l’instrumentalisation des prises de position et à l’exacerbation des clivages politiques et générationnels.
Le communiqué précise également que l’échange envisagé devait associer Maud Koffler et Maxime Lledo. Lescure tient à rejeter l’idée d’un affrontement caricatural entre générations, insistant sur le caractère culturel et non partisan de son propos.
La réaction de Sud Radio et le contexte éditorial
La direction de Sud Radio a rendu public un message de respect vis‑à‑vis de la décision du chroniqueur. « Nous respectons pleinement ce choix, tout en le regrettant pour la liberté d’expression. Nous remercions Pierre Lescure pour la qualité des échanges que nous avons eus avec lui et nous continuons, en cette rentrée, de proclamer un ton libre et indépendant », a déclaré la station.
Le départ avorté de Pierre Lescure illustre la difficulté pour les médias à proposer des formats de débat mêlant figures établies et jeunes voix, dans un contexte où chaque nomination peut rapidement devenir un fait politique. Sud Radio avait manifesté sa volonté de créer un espace de confrontation d’idées ; la vive réaction médiatique a montré combien ces tentatives peuvent être perçues comme symboliques et propices aux polémiques.
Ce que cela dit de l’ambiance médiatique
L’affaire met en lumière trois tendances actuelles : la sensibilité accrue autour des prises de parole publiques, la polarisation des commentaires et la pression que subissent les personnalités médiatiques, même en amont de leur intervention. Le cas Lescure rappelle que l’annonce d’un projet suffit parfois à déclencher une polémique, indépendamment du contenu réel des échanges prévus.
Sans remettre en cause la liberté éditoriale des radios et télévisions, ce retrait montre combien les responsables et les talents hésitent désormais à s’exposer, au risque d’être réduits à des caricatures ou à des lignes partisanes. Pour l’heure, Pierre Lescure a préféré éviter que l’émission proposée ne serve de théâtre aux divisions évoquées dans son communiqué.
Le dossier reste clos pour Sud Radio et pour Lescure, mais il souligne une réalité persistante : dans le paysage médiatique français, les annonces et les castings éditoriaux sont désormais scrutés comme des marqueurs politiques, parfois davantage que comme des choix de programmation.